Pékin: 1er octobre 1949

La prise du pouvoir par Mao.

HISTOIRE POLITIQUEINTERNATIONAL.

Nous sommes le samedi 1er octobre 1949 à Pékin. Mao Zedong, 55 ans proclame l’avènement de la République populaire de Chine depuis le balcon de la Porte de la Paix céleste celle qui donne sur la grande place Tien An Men, à proximité de la Cité interdite des anciens empereurs. L’anniversaire de ce jour est depuis devenu fête nationale dans le pays et consacre donc la victoire du Parti communiste chinois sur les nationalistes de Tchang Kai-chek qui vont se réfugier sur l’ile de Taiwan.

C’est surtout l’aboutissement d’une guerre civile longue dans un pays ravagé par l’occupation japonaise et les guerres internes. Mao Zedong, né en 1893, issu d’une famille de paysans prospère, une éducation classique basée sur les textes confucéens. Dès l’adolescence, il va se rebeller contre cette éducation traditionnelle et commence à s’intéresser à d’autres idées, notamment nationalistes et réformistes. Il devient d’abord instituteur puis bibliothécaire mais se transforme rapidement en militant politique, fréquentant certains cercles marxistes.

A contrario de ses compagnons de route, Chou en Lai (qui devient son premier ministre) ou Hua ko feng qui font des séjours à l’Etranger, notamment à Paris pour forger leur idéal révolutionnaire, lui Mao, ne quittera pratiquement jamais la Chine et ne parle aucune langue étrangère. Il sera cependant à la tête de la « Longue Marche » à partir de 1934 qui va constituer l’épisode fondateur de la légitimité du PC chinois : une retraite militaire héroïsée où le futur « Grand timonier » s’impose comme chef incontesté. Il est clair que ce récit s’impose comme un mythe central de la propagande du régime, valorisant l’endurance, le sacrifice et la foi révolutionnaire.

En Chine, comme dans le reste du monde, la Chine représentait alors une « révolution culturelle » qui promettait une transformation radicale de la société et un rapprochement du peuple et du pouvoir. Très rapidement, la Chine Populaire de Mao est apparue comme un régime dictatorial, refermé sur lui-même avec à sa tête un dirigeant sanguinaire :

La politique du Grand Bond en avant (1958-1962) provoque une famine gigantesque : estimations entre 20 et 40 millions de morts.

La Révolution culturelle (1966-1976) qui n’a de « culturelle » que le nom entraîne persécutions, humiliations publiques, morts d’intellectuels, destruction du patrimoine.

Se sentant menacé dans l’exercice de son pouvoir, Mao avait alors décidé de « purger » le parti et la société des « éléments bourgeois » (sic), aidé par les « Gardes rouges » qui persécutèrent (voire éliminèrent) les professeurs, les intellectuels ou tout cadres susceptibles de remettre en cause son autorité. Le résultat de cette sinistre période se concrétisera par un chaos social, une paralysie économique et des destructions matérielles considérables mais qui permirent à Mao de rester au pouvoir jusqu’à sa disparition en 1976.

Mao est également perçu comme totalement incompétent : Ses décisions économiques (industrialisation forcée, collectivisation agricole) furent catastrophiques.

Pourtant, Mao reste une figure vénérée en Chine officielle, présenté comme le fondateur de la nation moderne, malgré son bilan humain dramatique. Cependant, De Gaulle décide de reconnaitre la Chine Populaire en 1964, provoquant au passage l’indignation des Etats-Unis (qui finiront toutefois à en faire de même avec Richard Nixon en 1972).

C’est un geste diplomatique fort : la France est le premier grand pays occidental à rompre avec la politique d’isolement de Pékin (jusque-là, beaucoup reconnaissaient Taïwan, la Chine nationaliste » comme seul représentant légitime). Le Président français expliquera cette initiative surprenante parl’affirmation de l’indépendance de la diplomatie française par rapport aux États-Unis et à l’URSS, mais par une réelle intuition : la Chine allait devenir une puissance mondiale incontournable, comme l’écrira d’ailleurs son ministre Alain Peyrefitte dans son best-seller « Quand la Chine s’éveillera » paru en 1973.

On a pu constater, dans ces mêmes années 60-70, l’enthousiasme d’une partie de l’intelligentsia française pour la Chine Maoïste et non des moindres : Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoir, Maurice Clavel, André Glucksmann, tous issus de l’Ecole Normale Supérieure qui justifieront leur choix en voyant ce régime comme une alternative au modèle Soviétique tendance Stalinienne.

Ce n’est qu’à partir de la fin des années 1970 (révélations sur les violences, récits de rescapés, ouverture de la Chine après Mao) que la fascination se transforme en désillusion et autocritique…. Et puis, la Chine version Deng Xiaoping entre 1978 et 1992 s’est lancée dans une série de réformes économiques majeures. Tout en restant communiste, elle a opéré une ouverture au capitalisme, en favorisant les investissements étrangers et en développant le commerce.

On se souvient de sa formule : « Peu importe que le chat soir noir ou blanc, s’il attrape des souris, c’est un bon chat » qui montre sa volonté de privilégier le pragmatisme que l’idéologie…C’est ainsi que la Chine naguère pauvre et repliée sur elle-même a alors connu un essor économique considérable qui en fait aujourd’hui la deuxième puissance mondiale avec la volonté de prendre le leadership par rapport aux USA.

C’est en tout ca la volonté de Xi-Ping, l’actuel dirigeant qui aime combiner les réformes économiques mais qui entretient non sans ambiguïté le nationalisme, l’héritage du parti communiste et une volonté de restaurer la « grandeur » de la Chine, s’inspirant de ses deux prédécesseurs, Mao et Deng.

76 ans jour pour jour après cette fameuse journée du 1er octobre 1949, Mao reste une référence symbolique essentielle qui permet de tenir l’unité et l’identité du régime communiste Chinois tandis que Deng est plutôt considéré comme le grand architecte du « grand bond » des quarante dernières années.