Le Combat des Chefs.

Editorial du 17 mars.

EDITORIAL

Deux ans, c’est long !

Depuis la réélection d’Emmanuel Macron en 2022, la question de sa succession en 2027, suscite déjà de vifs débats au sein de la classe politique française, car il ne pourra briguer un troisième mandat. On se souvient que la majeure partie de ses adversaires les plus virulents ont plutôt souhaité son départ prématuré, soit en démissionnant, ce que le locataire de l’Elysée n’a pas vraiment l’intention de faire, soit en étant destitué, mais le processus parlementaire pour y arriver reste un chemin semé d’embûches.

On ne reviendra pas sur la succession d’évenements qui se sont accumulés depuis la dissolution surprise de l’Assemblée nationale en juin 2024 qui était censé clarifié le paysage politique et ses composantes mais qui a finalement débouché sur une situation encore plus compliquée que précédemment,

Depuis quelques jours, on assiste au sein de la Majorité Présidentielle (très relative) à la confirmation d’un duel fratricide qui s’amorce entre l’actuel Premier Ministre, François Bayrou et l’un de ses prédécesseurs, Edouard Philippe avec comme horizon (sans jeu de mots) la présidentielle de 2027. Tous deux se réclament comme des héritiers du Macronisme, un mouvement issu du dégagisme politique de 2017 et qui comme chacun sait est marqué par une usure du pouvoir et une défiance envers l’actuel chef de l’Etat.

Allié de longue date à Emmanuel Macron, François Bayrou, vieux briscard de la politique et riche de trois campagnes présidentielles, toujours debout après plusieurs tentatives de motion de censure, n’a pas dit son dernier mot et continue de favoriser le dialogue entre les différentes factions politiques compatibles pour gouverner.

En outre, il compte éviter une nouvelle montée en puissance du Front National représentée par une Marine Le Pen qui attend son heure, mais dont l’avenir est suspendu au verdict prochain qui confirmera ou non la possibilité de pouvoir se présenter à la présidentielle suite à sa condamnation dans l’affaire des emplois fictifs du Parlement Européen, la solution de rechange serait alors son dauphin Jordan Bardella....

De son côté, Édouard Philippe, ancien Premier ministre lors du premier quinquennat et actuel maire du Havre, a officiellement annoncé de façon précoce sa candidature à l'élection présidentielle de 2027 mais s’affichant d’emblée comme le prétendant le plus sérieux à la succession d’Emmanuel Macron, au vu de sa popularité persistante dans les sondages…

Néanmoins, la relation entre les deux hommes s’avère d’une nature complexe, même s’ils ont affiché en public une complicité certaine mais qui ne doit faire oublier les divergences sur divers sujets en coulisses…Mais voilà qu’au sein de cette même Majorité, un troisième homme pourrait faire son apparition dans le champ des prétendants et redistribuer les cartes...

Il s'agit bien sûr de Gabriel Attal, l’ancien Premier Ministre et actuel chef de file des parlementaires Macronistes à l’Assemblée, toujours considéré comme un « jeune prodige » de la politique française et dont la popularité ne faiblit pas non plus possède de sérieux atouts dans cette succession délicate, le tout est finalement de savoir si cette « Guerre des trois » aura lieu ou pas ?

L’éventualité d’un duel au premier tour entre François Bayrou et Edouard Philippe pourrait constituer une certaine fragilisation de la Majorité dispersant au passage les voix du Centre Droit et du Centre Gauche et favoriser de facto, l’Extrême-droite en 2027, voire d’empêcher un candidat du Centre a pouvoir se maintenir au second tour provoquant un duel inattendu entre le RN et une coalition de Gauche plurielle du type NFP, mais dont on voit les limites en matière de cohésion politique, comme ce fut le cas lors des dernières législatives…

Le Rassemblement National, qu’il soit représenté par Marine le Pen ou Jordan Bardella et aidé par l’apport des voix d’une droite naguère modérée et tendant à se radicaliser pourrait ainsi en profiter pour espérer s’imposer à l’issue du second tour face à une gauche éclatée menée par un leader contesté (Mélenchon) à moins qu’un représentant de la Gauche social-démocrate incarnée par Bernard Cazeneuve ou Raphael Glucksmann ne s’impose, récupérant au passage la frange la plus à gauche des Macronistes ainsi que celle des autres déçus de l’ancienne majorité…

Il est clair qu’un candidat du Bloc Central, s’il veut pouvoir perpétuer l’héritage du candidat sortant doit être seul en piste et tenter d’apporter un second souffle à un mouvement politique, passablement rongé par l’usure du pouvoir. Face une nouvelle fois à l’Extrême-Droite au second tour, il pourrait une fois de plus bénéficier d’un nouveau front Républicain, même si certains à droite, au centre ou à même à gauche, jurent par Toutatis qu’il ne se reproduira plus !

Le combat des chefs qui s’annonce pour 2027 risque de réserver de grosses surprises et de rudes duels en perspective qui opposeront les guerriers gaulois qui aspirent à nous gouverner mais dont un seul sera sacré lors du banquet final au second tour, ce qui n’est pas anormal au pays d’Asterix…

Philippe DUPONT