La colère repose de l'amertume

Auteur: Thibault File Etoupe.

BILLET

Il avait vraiment la dent dure lorsqu’il a qualifié le second mandat d’Emmanuel de « naufrage », s’inquiétant au passage de cette « crise de régime » et affirmant que les institutions démocratiques ont été fragilisées par des décisions déroutantes telle la dissolution de l’Assemblée nationale en 2024.

Interrogé par l’hebdomadaire « Le Point », il a accusé le macronisme d’avoir détruit les traditionnels partis politiques en 2017, de Gauche comme de droite, avec le dessein de ne pas provoquer des coalitions de compromis mais plutôt de les absorber…

Cette stratégie implacable a finalement correspondu à un non-sens politique, plus enclin à favoriser un élan techno-libéral que d’instaurer un véritable dialogue politique…

Un réquisitoire virulent provoqué par un homme en colère. Mais de qui s’agit-il ? d’un membre de LR, fidèle à ses convictions et qui n’a jamais voulu franchir le Rubicon ou bien d’un militant PS qui lui non plus à pas céder aux sirènes du Macronisme triomphant tandis que son parti de la Rose au poing sombrait après la déroute de la présidentielle ? Ou bien d’un militant LFI qui aimerait bien éradiquer à jamais le macronisme, un « accident » selon lui dans l’histoire politique française ou finalement d’un militant RN qui aimerait bien jouer au « recours » et bouter le locataire de l’Elysée hors de son trône pour y mettre à la place l'un des siens ?

Vous n’y êtes pas du tout, il s’agit de Manuel Valls qui, il y a encore très peu de temps était ministre de…Macron dans le gouvernement Bayrou mais qui a été « évincé » dans le second gouvernement Lecornu II après y avoir été brièvement renommé.

L’ancien ministre ne décolère pas car il ne comprend pas pourquoi il a été mis à l’écart,  à l'instar d’Elisabeth Borne (en outre ex-Premier ministre de Macron mais qui elle, n’a pas bronché publiquement).

Employant un ton bravache, il n’hésite pas à affirmer qu’il paye sa réussite dans certains dossiers dont celui de la Nouvelle-Calédonie et qu’il serait victime de son succès, provoquant cynisme et mesquinerie de sa « hiérarchie ».

Oui, mais voilà, notre fougueux ex-maire d’Evry oublie qu’il a accepté de faire partie d’un système qu’il dénonce à présent.

N’oublions pas que sa relation avec Emmanuel Macron a toujours été compliquée. A l’origine, l’ambitieux Valls était premier ministre de François Hollande entre 2014 et 2016 tandis qu’Emmanuel Macron faisait partie de son gouvernement en qualité de ministre des Finances.

En 2016, leur point commun aura été de vouloir s’émanciper politiquement d’une majorité présidentielle fractionnée et en difficulté sous l’ère Hollande, ce dernier décidant finalement de ne pas se représenter.

On connait la suite, Emmanuel Macron, qui a vaguement appartenu au PS a créé son propre mouvement politique venu de nulle part et sans programme idéologique très clair pour finalement largement remporté la mise tandis que Manuel Valls a mordu la poussière lors de la primaire du PS face à un Benoit Hamon qui a subi le même sort à la Présidentielle.

Très largement élu face à Marine Le Pen, Emmanuel Macron a ainsi provoqué un véritable « raz-de-marée » au niveau des législatives, refusant au passage de soutenir un Manuel Valls (qui quémandait pourtant une « étiquette » majorité présidentielle) dans la 1ère circonscription de l’Essonne (Evry-Corbeil), toutefois réélu de justesse mais avec des soupçons de fraude selon sa rivale Mélenchoniste, Farida Amrani..

La suite est toujours connue : départ d’Evry et de l’Essonne, conquête de Barcelone qui s’est transformée en bérézina puis retour en France avec une longue traversée du désert doublée d'une grande méfiance à son endroit de la part de ses ex-copains du PS (qui l’ont toujours catalogué « à Droite » tandis que ses autres adversaires l’affublaient de « girouette pathétique ».

Mettons ces propos acerbes de l’ex-Premier Ministre sur le compte de l’amertume et revenons toutefois sur sa vision de l’après-macronisme : une chose est presque sûre, le « en même temps » prôné par l’actuel Président ne survivra à son départ en 2027 et que la construction d’une « véritable » coalition qui irait du Centre-Droit aux socialistes pourrait être la solution pour échapper aux risques d’une victoire du Rassemblement National, tout en évitant une confrontation frontale avec la gauche Radicale.

Mais quel rôle lui-même pourrait-il jouer, au vu de sa piètre image personnelle auprès des acteurs concernés, mis à part peut-être en s’alliant avec Raphael Glucksmann pour bâtir ce « plan b » ? A condition de ne pas entretenir de nouvelles relations du genre « Je t’aime moi, non plus » comme avec Emmanuel Macron et de connaitre lui-même un naufrage définitif…

A suivre…