Jordan B. ou le syndrome du vainqueur d'avance.

Sous la Vème République, la malédiction de certains favoris....

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Il a eu 30 ans au mois de septembre et ses supporters de plus en plus nombreux aimeraient le voir devenir le plus jeune président de l’histoire de la Vème République en 2027, battant au passage le record de l’actuel locataire de l’Elysée, Emmanuel Macron qui avait 39 ans en 2017. Il faut dire qu’il a le vent en poupe, Jordan Bardella, Président du Rassemblement National et qu’il fait de l’ombre à une Marine Le Pen, dont on connait les tracas judiciaires et qui est de moins en moins sûre de pouvoir se présenter pour la 4ème fois à la magistrature suprême.

Avec son physique de gendre idéal et sa propension à dire ce qu’un bon nombre de français veulent entendre, l’actuel et peu assidu député européen caracole en tête des sondages concernant la Présidentielle 2027 : on parle de plus de 35 % des intentions de vote au 1er tour et une large élection au second tour quel que soit l’adversaire : plus serré en ce qui concernerait Edouard Philippe (52 %), Raphael Glucksmann (58 %) mais bien plus triomphaux face à Jean Luc Mélenchon (74 %).

En plus du vote d’adhésion traditionnel du camp de l’extrême droite, certains sondages évoquent des apports significatifs venus d’autres électorats (droite modérée, retraités, électeurs des partis affaiblis) — ce qui consolide cette avance de Bardella.. Pour celui qui se voyait déjà Premier Ministre en 2024, voilà de quoi pavoiser et se laisser griser par ces sondages flatteurs. Oui, mais voilà, ils ne font que mesurer des intentions de vote à un moment donné : ils ne garantissent pas un résultat le jour du vote. Plusieurs politologues et anciens responsables interrogés relativisent déjà ces projections.

D’ailleurs, sous la Vème République, l’Histoire s’est révélée parfois cruelle pour les « favoris » à cause d’un certain nombre de facteurs qui entrent en lice, tels l’apparition de nouveaux candidats, des évènements imprévus, des alliances inattendues, etc….L’issue dépendra aussi de qui sera réellement candidat(e). De plus, les choix de second tour, les reports de voix, l’abstention ou les réactions aux programmes peuvent modifier radicalement le résultat.

Jordan Bardella illustre parfaitement une dérive contemporaine du syndrome des vainqueurs d’avance., il bénéficie d’une exposition médiatique massive et d’un narratif de réussite assurée. Mais derrière l’image jeune et dynamique, certains observateurs dénoncent également une carence de substance politique :S’il maîtrise indéniablement les codes de la communication et des réseaux sociaux, ses prises de position manquent souvent de profondeur ou de cohérence programmatique.

Cette médiatisation peut masquer l’absence de vision stratégique à long terme, ce qui devient dangereux dès qu’un scrutin majeur se profile.S’il est perçu comme un favori avant même d’avoir confronté de vrais enjeux électoraux, chaque contradiction ou faiblesse sera amplifiée.En somme, Bardella incarne une version moderne du phénomène : un vainqueur d’avance façonné par l’image plutôt que par l’expérience, qui peut se révéler fragile face à l’exigence réelle du pouvoir.

Toutefois, on a pu voir que dans le passé, un homme expérimenté comme Edouard Balladur, promu par tous comme le vainqueur dès le 1er tour de l’élection présidentielles de 1995 a finalement mordu la poussière face à son « ami de 30 ans » Jacques Chirac que certains qualifiaient de « loser pathétique » mais qui l’a finalement emporté tout comme en 2002, face à un Lionel Jospin, également sûr de lui et qui a subi la pire des froides à l’issue du 1er tour, coiffé au poteau par Jean-Marie le Pen.

François Fillon aurait dû être Président de la République en 2017 avant de trébucher pour cause d’emploi fictif concernant sa fidèle épouse Pénélope tout comme Dominique Strauss-Kahn que rien ne devait arrêter sinon la justice américaine…Que dire d’Alain Juppé, Michel Rocard ou encore Jacques Delors que des sondages flatteurs promettaient à une irrésistible ascension et qui ne sont pas aller au bout de leur rêve et qui ont trébuché lors de primaires ou tout simplement préféré renoncer par crainte d’un enjeu massif….