3ème épisode: L' An III- 1964-1965
Les Années Pompidou 1962-1974
FEUILLETON


1ère partie: 1964
En cette année 1964, Georges Pompidou entame sa troisième année en tant que chef du gouvernement. La Vème République, quant à elle, va bientôt fêter ses six ans, affirmant une certaine stabilité politique qui fait oublier progressivement l’éphémère IVème République…
Un gouvernement qui était marqué par une forte centralisation du pouvoir autour du général de Gaulle et par une volonté de moderniser la France, notamment à travers la planification économique et les grands projets industriels. Toutefois, Georges Pompidou pilote le gouvernement et s’affirme comme le maitre d’œuvre des grands chantiers de modernisation de la France, aussi bien au niveau des infrastructures, de l’aménagement du territoire, de la réorganisation du territoire et de la politique éducative et culturelle.
Le Premier ministre, fidèle des fidèles du Général de Gaulle n’en était pas son « collaborateur », comme on a tendance à qualifier à présent les Premiers Ministres, à contrario leur relation restera au beau fixe au moins jusqu’en 1968, après les évenements de Mai où il sera finalement remplacé par Maurice Couve de Murville. On aime à rappeler que celui qui a exercé le plus long mandat de chef de Gouvernement de la Vème République aura été à l'’initiative de nombreux projets qui ont fait de la France un pays résolument moderne, connaissant indéniablement une formidable expansion durant les « Trente glorieuses » que beaucoup de commentateurs d’aujourd’hui évoquent avec beaucoup de nostalgie;;;;
L’équipe gouvernementale est composée de Pierre Messmer (Défense), Roger Frey (Intérieur), Maurice Couve de Murville (Affaires Etrangères), Louis Joxe (Education nationale), Jean Foyer (Justice), Valery Giscard d’Estaing (Economie), André Malraux (Culture) ou encore Alain Peyrefitte (Information).Aucune femme n’est membre du gouvernement et comporte une très large majorité de membres de l’UNR, le parti présidentiel tandis que la mouvance Centriste ne comporte qu’une poignée de ministres ainsi que le Gaullisme de Gauche incarné par Edgar Pisani.
Le Président De Gaulle se réserve alors les domaines de la Défense Nationale et de la politique extérieure, amorçant au passage le début du désengagement de la France vis-à-vis de l’OTAN, apôtre d’une indépendance nationale, rendue possible par la force de dissuasion nucléaire. En janvier, sont créées les forces aériennes stratégiques (FAS) chargées de l’emploi des armes nucléaires au sein de l’Armée de l’air française
Elles sont l'une des trois composantes de la Force de dissuasion nucléaire française avec les Forces océaniques stratégiques (FOST) qui lancent les sous-marins nucléaires lanceurs d'engins (SNLE) et la Force aéronavale nucléaire (FANU) qui sont chargées de l'emploi des armes nucléaires de la Marine Nationale.
C’est indéniablement le début du désengagement militaire américain en France. Le chef de l’Etat cherche à renforcer l’autonomie stratégique de la France vis-à-vis des USA et de l’OTAN, dont le siège est à Paris et conteste la domination américaine sur les décisions militaires de l’alliance, partisan d’un commandement français indépendant qui prendra officiellement effet après le départ définitif des américains en 1967.
LE COUP D’ETAT PERMANENT
Mais, voilà qu’un des principaux leaders de l’Opposition, ancien Ministre sous la IVème République , François Mitterrand publie un essai politique virulent, « Le Coup d’Etat permanent »un ouvrage qui critique violemment la Constitution de 1958 instaurée par Charles de Gaulle que le Député de la Nièvre considère comme un système autoritaire favorisant une concentration excessive des pouvoirs entre les mains du président de la République.
Celui qui deviendra lui-même Président de la République en 1981, qualifie donc la Vème République de « Coup d’Etat permanent » en raison de la domination du pouvoir exécutif sur le législatif, dénonçant au passage le rôle quasi monarchique du Président qui échappe, selon lui, aux contre-pouvoirs traditionnels. Il n’hésite pas à affirmer que la nouvelle Constitution affaiblit le parlement et réduit le rôle des partis politiques, oubliant au passage ce qui avait entrainé la chute de la IVème République, du fait de son instabilité chronique…
François Mitterrand s’affiche ainsi comme un adversaire acharné du chef de l’Etat et du régime Gaulliste. On connait la suite, il affrontera le général de Gaulle lors de la présidentielle de décembre 1965, provoquant une grosse surprise au passage…Le parti dominant à gauche reste bien sûr le Parti Communiste Française, qui perd cette année-là son secrétaire général, Maurice Thorez. Celui qui fut Secrétaire général du PCF entre 1930 et 1964, disparait à l’âge de 64 ans lors d’un voyage en URSS.
L’ADIEU A THOREZ
En 1964, le Parti Communiste reste toujours fidèle à l’URSS, malgré des débats internes houleux au sujet de la « Déstalinisation » du Parti. Au niveau politique Français, le PCF Les élections de 1964 : Le PCF n’avait pas l’influence électorale qu’il avait eue pendant les années 1940 et 1950, notamment en raison de la montée de la SFIO (Section Française de l'Internationale Ouvrière) et de l'émergence du Parti socialiste, ainsi que des divisions internes au sein de la gauche française. En 1964, le PCF représentait environ 20-25 % des voix à l'échelle nationale.
Maurice Thorez est remplacé par Waldeck Rochet qui restera Secrétaire général jusqu’en 1972, remplacé alors par Georges Marchais. Le changement de direction marque une évolution dans les priorités du PCF, qui doit gérer la perte de pouvoir et de visibilité dans un contexte politique qui se fragmente, avec des tensions idéologiques internes.
LE TEMPS DES CANTONALES
Les élections cantonales ont lieu les 8 et 15 mars 1964 et 1562 Sièges sont à pourvoir. Au 1er tour, l’abstention est plutôt élevée, avec 44 % d’abstentionnistes mais moindre de celui de 1961 (45%), démontrant au passage qu’un grand nombre d’électeurs boudaient déjà les urnes à l’époque. Au second tour, l’abstention est moindre avec 41 %. La droite parlementaire, composée de l’UNR, du MRP et du CNIP obtient 895 sièges et résiste bien à la poussée de la Gauche, incarnée par le PC, la SFIO et les Radicaux avec 953 sièges. Les autres sièges, au nombre de 240 sont à distribuer entre des formations encore marginalisées comme l'Extrême-Droite, le PSU et surtout l’Action Locale qui obtient 204 sièges.
UN ETE 1964
L’été qui s’annonce est riche de deux nouvelles réformes importantes, d’abord le 27 juin est votée la loi qui procède à la création de l’Office de radiodiffusion-télévision française (ORTF), un nouvel organisme qui se veut plus autonome vis-à-vis de la Radio-télévision Française (RTF).
Une autonomie tout à fait relative à une époque où il demeure un véritable « monopole » des ondes (qui perdurera jusqu’en 1981) et ce, malgré les propos rassurants du Ministre de l’Information, Alain Peyrefitte qui proclame que la censure instaurée à la fin de la IVème République a bel et bien disparu. Vraiment ?
Curieusement, si l’information est supposée « muselée » (ou plutôt pratiquer l’autocensure pour ne pas faire de vagues), on constate qu’au niveau des programmes, des personnalités issus de la Gauche, tendance PC font les beaux soirs de la Télévision, à l’instar de Marcel Bluwal, Stellio Lorenzi ou encore Claude Santelli.
Après l’inauguration en décembre 1963 de l’imposante Maison de la Radio (surnommée la « Maison Ronde ») située dans le XVIème arrondissement de la Capitale, sur une avenue qui ne va pas tarder à prendre le nom de John Kennedy, le Président américain assassiné à Dallas (Texas) le 22 novembre dernier, on a vu naitre la deuxième chaine de télévision, dont l’audience est encore confidentielle face la première chaine (lointain ancêtre de TF1) ainsi que les stations de radio : France Inter, France Culture et France Musique.
Le Général de Gaulle avait chargé Roland Dhordain de procéder à la création de cet ensemble. Certes proche du pouvoir Gaulliste, le journaliste est néanmoins un professionnel hors pair, il sera a la tête de France Inter puis dans les années 70 puis de la Première Chaîne.
D’autres professionnel(les) qui ne cachent pas leur sensibilité gaulliste s’illustrent notamment à la direction de l’information, tel Michel Péricard (futur député-maire de Saint Germain en Laye), Jacqueline Baudrier ou encore Max-Petit, également Député UNR de Seine et Oise..
A la Télévision, on n’oublie pas non plus Michel Droit, « interviewer » assermenté du Général de Gaulle, brocardé par ses adversaires pour sa déférence envers le Chef de l’Etat, souvent qualifié de « vassal » du régime UNR.
Cette vaste entreprise publique de l’audiovisuel jouit d’un monopole des ondes sur le territoire français mais est toutefois confrontée à la concurrence de stations de radios dites » périphériques » , dont les émetteurs sont situés hors de l’Hexagone : c’est le cas « d’Europe No1 » créée en 1955, alors dirigé par Maurice Siegel (qui sera congédié à la demande de Jacques Chirac pour « persiflage » en 1974) et de Radio Luxembourg (qui va être rebaptisée RTL en 1966).
Malgré ce monopole, les radios périphériques, notamment Europe N°1 sont en possession de leadership en matière d’audience, attirant un auditorat jeune (on se souvient du très gros succès de « Salut les Copains » créé par Daniel Filipacchi et Franck Ténot).
SEINE ET SEINE OISE, CLAP DE FIN
Lors du décret du 10 juillet 1964, l’ancien département de Seine et Oise est démembré et va donner naissance à trois départements de la Grande Couronne : Yvelines (qui va garder le numéro d’Origine :78), le Val d’Oise (95) et l’Essonne qui hérite du « 91 », encore récemment attribué avant l’Indépendance de l’Algérie au département d’Alger ainsi qu’une partie des Hauts de Seine (92), Seine Saint Denis (93) et Val de Marne (94), eux-mêmes héritiers des anciens départements algériens qui rejoignent la petite couronne.
Le département de la Seine est également supprimé (comprenant alors une partie de la petite couronne, avec deux sous-préfectures : Saint Denis et Sceaux) pour donner naissance au Département de Paris qui se détache des départements de la petite couronne cités plus haut. Rappelons que la Seine et Marne restera inchangée, du fait d’une vague de protestations de ses élus de la voir coupée en deux départements distincts, ce qui explique aujourd’hui qu’elle représente à elle seule la moitié de la superficie de la Région Ile de France !
Politiquement, le pouvoir Gaulliste comptait bien cantonner l’influence du PCF, alors force majeure de l’Opposition de Gauche à un seul département, la Seine Saint Denis. Il craignait également que le Parti Communiste, fort de sa « ceinture rouge » ne s’allie avec la SFIO et ne s’empare des rênes du « Grand Paris » qui se dessinait.
L’APPEL DE LA REGION
Le 14 mars 1964, un décret institue les commissions de développement économique régional (CODER), 21 circonscriptions d’action régionale sont dotées d’un préfet de région.Etat encore profondément jacobin (on se souvient de l’ouvrage choc du géographe Jean-François Gravier « Paris et le désert Français » publié en 1947) , la France va alors poser les premières bases administratives de la régionalisation, sans autonomie réelle pour les régions.
C’est toutefois une étape vers la décentralisation, qui ne deviendra effective qu’à partir des années 80 (lois Defferre, 1982) avec l’arrivée de l’Union de la Gauche au pouvoir.21 régions sont définies (la Corse est alors rattachée à la Région Provence Alpes Côte d’Azur) , mais sans pouvoir politique autonome (elles n'ont pas encore de conseil régional élu).. Ce sont des structures de coordination administrative, et non des entités politiques.
Avant 1964, la France était composée de régions historiques, mais ces dernières n'avaient pas de structures administratives officielles ni de gouvernance propre. Les départements étaient les seules unités administratives de base.
RECONNAISSANCE DE LA CHINE COMMUNISTE
La France a officiellement reconnu la République populaire de Chine (RPC) le 27 janvier 1964, devenant ainsi le premier grand pays occidental à établir des relations diplomatiques complètes avec Pékin. Cette décision, prise par le général Charles de Gaulle, s'inscrivait dans sa volonté de mener une politique étrangère indépendante des blocs Est-Ouest en pleine Guerre froide. Il considérait la Chine comme une puissance incontournable, déclarant : « La Chine est une chose gigantesque. Elle est là. Vivre comme si elle n’existait pas, c’est être aveugle » .
Cette reconnaissance a marqué le début d'une relation diplomatique qui a connu des hauts et des bas au fil des décennies. Malgré des divergences politiques et des tensions, notamment sur les questions des droits de l'homme et de la politique internationale, la France et la Chine ont maintenu un dialogue constant. En 2004, leur relation a été élevée au rang de « partenariat stratégique global » En 2024, les deux pays ont célébré le 60e anniversaire de leurs relations diplomatiques, soulignant l'importance de leur coopération malgré les défis persistants.
LE BOUT DU TUNNEL
Le Général de Gaulle reste hostile à la demande d’admission du Royaume-Uni au sein du Marché Commun dès 1963, imposant même son véto car jugeant ses voisins insulaires proprement incompatible avec l’idée d’Union Européenne
L’ancien Chef de la France Libre à Londres est un téléspectateur assidu de « Thierry la Fronde » le feuilleton télévisé du moment au succès colossal, dont le héros Thierry de Janville (incarné par Jean-Claude Drouot) ne cesse de filer la raclée aux Anglais pendant la Guerre de Cent ans…
Pourtant, le 3 juin seront signés les accords franco-britanniques par échange de lettres afin de lancer des études géologiques sur la réalisation d’un tunnel sous la Manche et sur le rôle de la commission chargée de leur surveillance. Le but: Relancer l’idée d’un lien fixe sous-marin entre les deux pays, un projet déjà évoqué à plusieurs reprises depuis le XIXe siècle.
Cependant, le projet a été mis en pause peu après pour des raisons politiques, économiques et de sécurité. Ce n’est qu’en 1986 qu’un nouvel accord (le traité de Canterbury) a été signé, relançant réellement le projet de construction. Le tunnel a été achevé en 1994 et ouvert au trafic ferroviaire.
POURTANT QUE LA MONTAGNE EST BELLE
Le Plan Neige de 1964 est une politique d'aménagement lancée par l'État français pour développer le tourisme hivernal en montagne, principalement dans les Alpes. Voici un résumé clair et structuré : La France veut rattraper son retard face à la Suisse et à l'Autriche dans le domaine du tourisme de sports d'hiver.
Le tourisme devient un levier économique majeur pour les zones de montagne, souvent enclavées et peu industrialisées. Plusieurs stations de ski modernes seront créées, bien équipées, directement accessibles avec hébergement, remontées mécaniques et commerces. Citons La Plagne (en 1961), Avoriaz (1966) Les Arcs (1968) ou encore Flaine et Val Thorens (1969). Plus d’une vingtaine vont être créées jusqu’aux années 70.
C’est un véritable « boom » économique que vont connaître ces régions montagnardes et placer la France en tête des équipements après en avoir été longtemps en retard par rapport à ses voisins mais certains pointent toutefois du doigt les différents méfaits causés par l’artificialisation des paysages, une urbanisation trop brutale mais également des carences pour développer une activité tout le reste de l’année…
QUAND J’ENTENDS LE MOT CULTURE, JE PENSE A MALRAUX.
" La culture ne s'hérite pas, elle se conquiert" (André Malraux)
Personne n’a oublié André Malraux, cet écrivain, intellectuel engagé, fidèle gaulliste et ancien résistant qui restera pendant 10 ans Rue de Valois, siège du ministère de la Culture, spécialement créé pour lui . Un record de longévité et un bilan aussi mémorable que dense pour l’ancien Prix Goncourt avec la « Condition humaine » et le réalisateur de « l’Espoir », tourné pendant la Guerre Civile Espagnole en 1936.
Autant étonnant que cela puisse paraître, Malraux est un authentique autodidacte qui ne possédait pas le baccalauréat bien qu’il ait fréquenté brièvement le Lycée Condorcet a Paris ni fait des études supérieures. Et pourtant, il est devenu un écrivain, intellectuel, aventurier, homme politique et ministre influent. Son immense culture acquise par passion et curiosité : il lit énormément dès son jeune âge, surtout de la littérature, de la philosophie, de l’art et de l’histoire. Il écrit ses premiers textes dans sa vingtaine, voyage beaucoup (notamment en Asie) se passionne également pour l’art.
La décennie passée au sein du ministère de la Culture va avoir pour objectif de démocratiser la Culture et de la rendre accessible à tous. La valorisation du patrimoine et la création contemporaine seront également ses chevaux de bataille. Il créé les Maisons de la Culture dès 1961, les transformant en centres culturels pluridisciplinaires (théâtre, ciné, expos, musique, etc…) comme c’est le cas au Havre ou à Bourges. L’idée est d’amener « les grandes œuvres au peuple ».
A travers le pays, de grands chantiers de rénovation sont lancés, concernant les cathédrales, les monuments historiques et une grande partie des quartiers anciens. La loi Malraux de 1962 avait fait ses premiers effets notamment sur le Quartier du Marais à Paris. Le soutien aux arts vivants et aux artistes permet d’aider les théâtres publics et de créer des centres dramatiques nationaux et de donner des subventions aux compagnies, aux orchestres et aux écrivains. De nombreuses créations de bibliothèques dans les villes.
JEAN MOULIN
La cérémonie de transfert des cendres de Jean Moulin au Panthéon s'est déroulée les 18 et 19 décembre 1964, à l'initiative du général de Gaulle et du ministre des Affaires culturelles, André Malraux. Cet événement visait à honorer Jean Moulin, figure emblématique de la Résistance française pendant la Seconde Guerre mondiale. Le 18 décembre, les cendres présumées de Jean Moulin furent exhumées du cimetière du Père-Lachaise et transportées au Mémorial des martyrs de la Déportation, situé sur l'île de la Cité à Paris. Une garde d'honneur composée de 194 compagnons de la Libération, représentant diverses tendances politiques, veilla sur l'urne funéraire. Dans la nuit, une procession aux flambeaux traversa Paris pour acheminer l'urne jusqu'au Panthéon.
Le 19 décembre, la cérémonie officielle eut lieu sur le parvis du Panthéon, en présence du général de Gaulle, de la famille de Jean Moulin, dont sa sœur Laure, et de nombreuses personnalités politiques et anciens résistants. Le "Chant des Partisans" fut interprété, rendant hommage à l'ensemble des résistants. Lors de cette cérémonie, André Malraux prononça un discours mémorable, devenu l'une des oraisons funèbres les plus célèbres de la Ve République. Il débuta par la phrase : « Entre ici, Jean Moulin, avec ton terrible cortège… », évoquant les souffrances des résistants et des déportés. Ce discours rendit hommage non seulement à Jean Moulin, mais aussi à tous ceux qui ont combattu et souffert pour la liberté de la France
La panthéonisation de Jean Moulin symbolise la reconnaissance officielle de la Résistance française par la République. Elle marque également la volonté de Charles de Gaulle de réconcilier les différentes tendances politiques de la Résistance et de promouvoir l'unité nationale autour de figures héroïques
LA FIBRE SOCIALE
En 1964, le paysage syndical français connaît un moment clé de son histoire avec la transformation d'une partie importante de la CFTC (Confédération française des travailleurs chrétiens) en CFDT (Confédération française démocratique du travail) lors du congrès de novembre, avec cette volonté de déconfessionnaliser la centrale syndicale née en 1919. En effet, 70 % des délégués votent pour la laïcisation de la confédération et abandonne la référence Chrétienne.
Leur objectif est de promouvoir un syndicalisme démocratique, laïque et autogestionnaire et surtout un rapprochement avec les mouvements de gauche et les nouvelles idées sociales.Eugène Descamps, précédemment secrétaire général de la CFTC prend les rennes de la nouvelle organisation qu’il dirigera jusqu’en 1971, date à laquelle Edmond Maire lui succèdera. Concernant la CFTC , c’est Jacques Tessier qui reprend le secrétariat général jusqu’en 1970 où il sera remplacé par Jean Bornard.
La CGT est alors le syndicat le plus important en nombre d’adhérents. Comme on le sait, il est fortement lié au Parti Communiste. D’ailleurs son secrétaire Général, Benoît Frachon est également membre du Bureau Politique du PCF comme d’ailleurs le sera son successeur Georges Séguy en 1967.
Force Ouvrière (FO), créée suite à la session avec la CGT en 1947 est dirigé depuis 1963 par André Bergeron qui restera à son poste jusqu’en 1989, date à laquelle il sera remplacé par Marc Blondel. Le syndicat se veut indépendant des partis politiques et défend une ligne réformatrice et attachée à la démocratie sociale.
La Confédération générale des Cadres (CGC), créée en 1945 par Jean Ducros est remplacée depuis 1955 par André Malterre qui restera en poste durant deux décennies propose :
· la défense d'un système de retraite particulier et la reconnaissance d'une spécificité « cadre » dans toutes les conventions collectives ;
· l'attachement à la hiérarchie des salaires ;
· la recherche de mesures fiscales favorables à l'encadrement.
Côté Patronal, l’ancêtre du MEDEF s’appelle alors le CNPF (Conseil National du Patronat Français) créée en 1945 à la demande du gouvernement qui souhaitait disposer d’un interlocuteur représentatif du Patronat français au lendemain de la Guerre. Son premier président est Georges Villiers qui sera remplacé par Paul Huvelin en 1966.
LA CHAUSSEE DES GEANTS
Durant son « sextennat » de chef de gouvernement, l’aménagement du territoire a connu son apogée avec le développement du réseau autoroutier et la construction des premières grandes liaisons modernes : l’Autoroute du Soleil (futur A6), dont le premier coup de pioche avait démarré dès 1953 pour arriver au sud de Corbeil-Essonnes en 1960 et dont les travaux s’accélèrent alors mais par tronçons via Auxerre et Avallon (Yonne).
La plus ancienne Autoroute (A13) dont les premiers tronçons remontaient à l’avant-guerre se rapproche alors de l’agglomération Rouennaise…
L’autoroute du Nord (futur A1) est la plus avancée car commencée dès 1950 et sera totalement achevée en 1967.
La modernisation ferroviaire est également en route, une réflexion pour créer des trains à grande vitesse est entamée mais ne sera véritablement mise en route que dans la seconde moitié des années 70.
A contrario, de nombreuses lignes secondaires jugées peu rentable (la chute de la fréquentation est en grande partie liée à l’essor de l’automobile) tandis que l’électrification du réseau ferré s’intensifie…
Dans le cadre de la réorganisation territoriale de la Région Parisienne, un nouveau métro express régional est en construction pour diminuer les temps de transport des habitants de la Région (que l’on appelle pas encore les Franciliens), la première liaison Etoile-Nation (qui sera un tronçon de St Germain en Laye à Boissy St Léger) sera inaugurée en 1969…
Mais cette France en pleine fièvre infrastructurelle ne doit pas faire oublier son point noir qui persiste depuis les années 50 : celui de la pénurie de logement et des mal-logés et la persistance de nombreux bidonvilles à proximité des plus grosses agglomérations.
En Ile de France, on a oublié les bidonvilles de Massy, de Nanterre ou de la Courneuve qui abritaient alors de nombreux travailleurs immigrés.
Face à l’exode rural de plus en plus important (on se souvient de la chanson de Jean Ferrat « La Montagne » (1965) : « Ils quittent un à un le pays pour s’en aller gagner leur vie, loin de la terre où ils sont nés, depuis longtemps ils en rêvaient, de la ville et de ses secrets, du formica et du ciné » .Un vaste programme immobilier est alors lancé en Région Parisienne et dans la plupart des Grandes villes Françaises.
C’est la création des ZUP (Zone Urbaine Prioritaire) qui vont permettre de palier à cette pénurie de logements, organisée de façon planifiée sous forme de politiques des Grands ensembles, citons ceux de Créteil, Massy-Antony, Sarcelles, Creil, Nancy, Vénissieux, quartiers nord de Marseille, Le Mirail à Toulouse, etc….
L’objectif était alors de créer des quartiers complets avec écoles, commerces et transports intégrés avec une mixité sociale : populations issues du monde rural, mal logés des banlieues, rapatriés d’Afrique du Nord et première génération de populations immigrées d’Europe comme d’Afrique venues pour des raisons économiques et parfois politiques.
A la grande époque des plans quinquennaux, Georges Pompidou croit aux grands travaux comme moteur de la modernisation et de la puissance nationale. Il pose les bases d’un aménagement du territoire centralisé à la fois centralisé et structurant qui sera poursuivi lorsqu’il sera élu président au début des années 70….